Marrant dans Libé de ce matin, à l’occasion de l’ouverture de la FIAC : un papier entier est consacré à la célébration des avantages fiscaux consentis par le gouvernement aux « mécènes ».
En gros, le journaliste se réjouit de la possibilité, pour les amateurs d’art, de déduire de leurs impôts jusqu’à 60% des dons effectués en faveur de fondations ou d’associations culturelles, à concurrence de 20% de leurs revenus imposables.
Le journal se félicite par ailleurs de l’encouragement fiscal accordé aux entreprises, qui peuvent désormais déduire 90% de l’achat de « tout chef d’œuvre considéré comme un trésor national ».
Loin de moi l’idée de protester contre ces mesures, bien au contraire, mais je trouve assez curieux que Libé puisse légitimer cette pratique en considérant qu’elle pourra « donner une impulsion décisive à un marché très handicapé par rapport aux Etats-Unis ».
Ne s’agit-il pas là de la constatation qu’il est possible, par des incitations fiscales ciblées, de stimuler un secteur économique et de lui permettre de récupérer un avantage concurrentiel au niveau international en acceptant de priver l’Etat d’une partie de ses ressources ? Et si un tel procédé est efficace dans le monde de l’art contemporain, ne pourrait-il pas l’être dans d’autres sphères économiques ?
L’article va même jusqu’à ressortir cette vieille lune contre le « droit de suite », une taxe européenne permettant aux artistes ou à leurs ayant-droit de profiter par ricochet des prix astronomiques qu’atteignent certaines œuvres au terme de reventes successives. Du point de vue des marchands d’art et des collectionneurs, dont les pratiques spéculatives n’ont rien à envier à celles des traders boursiers, cet impôt pourtant plafonné à 12 500 € pour des œuvres estimées à plusieurs millions, serait en effet la cause du manque de compétitivité des marchés de l’art de l’Union, qui perdraient du terrain face aux Etats-Unis, à la Suisse ou à Monaco…
Pour Libé, c’est sûr, plutôt qu’une harmonisation fiscale sans doute impossible à obtenir des salles des ventes bâloises ou new-yorkaises, l’idéal serait d’alléger un peu notre code des impôts. Ah bon…
©Commentaires & vaticinations
Ah oui, mais monsieur, c'est que c'est différent, l'art, c'est de la "koultourrre"... Donc, l'argent n'y est plus sâââle. L'argent y gagne tout d'un coup des vertus^qu'on ne lui accordait pas. Le profit est permis et même vertueux, car il permet de faire vivre des artistes, et il est bien connu que, dans le monde de l'art, il n'y a plus de patrons exploiteurs se gavant de revenus du Kâpïtal et de pauvres salariés opprimés qui triment pour quelques clopinettes. Il n'y a plus que des mécènes et des artistes, heureux.
Je suis quand même étonné que l'article ne cite pas une seule fois le terme "exception culturelle à la française".
Rédigé par : Nicolas | vendredi 22 octobre 2004 à 10:01